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sur les Passions.

Tout ce qui appartient à l’homme vain, est toujours dans son idée ce qu’il y a de mieux en chaque genre : ses maisons sont plus belles que celles des autres, son équipage est plus brillant, ses meubles sont mieux choisis, ses habits d’un plus grand goût, ses chevaux, & ses chiens de meilleure race : son vin, si vous l’en croyez, a le fumet plus agréable que celui de ses voisins, sa cuisine est meilleure, sa table mieux servie, ses domestiques sont plus adroits : l’air qu’il respire est plus sain, le terroir qu’il cultive plus fertile, ses fruits mûrissent les premiers, & sont les plus exquis. Cette piece, vous dira-t-il, est remarquable pour sa nouveauté, cette autre pour son antiquité ; celle-ci est le chef-d’œuvre d’un célebre artiste ; celle-là a appartenu à un tel prince ou à un tel grand seigneur. Toutes les choses, en un mot, qui sont belles, utiles, ou surprenantes deviennent, par ce moyen, des sujets d’orgueil : or la seule propriété qu’elles ayent en commun, c’est de produire le même effet, qui est de nous donner du plaisir : d’où il s’ensuit que le plaisir est la cause produc-