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Réflexions.

Les hommes sont encore fiers de la température de leur climat, de la fertilité de leur sol natal, de la bonté des vins, des fruits, ou d’autres alimens qu’il produit, de la douceur ou de l’énergie de leur langue, & ainsi de suite. Ces objets se rapportent évidemment aux plaisirs des sens, on les regarde comme agréables au tact, au goût, à l’ouïe ; comment seroit-il possible qu’ils nous enorgueillirent, si ce n’étoit par ce moyen de transition que nous avons expliqué ?

Il est un orgueil d’un genre opposé : il y a des hommes qui affectent de dégrader leur patrie par des comparaisons désavantageuses avec les pays où ils ont voyagé ; étant chez eux, entourés de leurs compatriotes, ils ne comptent pour rien le rapport qui les lie à leur nation, il se perd pour eux dans le grand nombre avec lequel ils le partagent ; au-lieu que ce rapport éloigné à des contrées étrangeres qui ne consiste qu’à les avoir vues, & à y avoir vécu, leur paroît d’autant plus important qu’ils pensent que peu de personnes y participent :