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De La Religion.

familiere, devenus bientôt les principaux objets de culte, rappellent insensiblement cette idolâtrie que la dévotion fervente des timides & misérables mortels, & les pieuses exagérations qui l’accompagnent, avoient bannie des esprits. Cependant les religions idolâtres, chargées de plus en plus de conceptions matérielles & grossieres, se détruisent à la fin elles-mêmes : les divinités étant avilies par les portraits indignes qu’on en trace, il en résulte un nouveau retour vers le théïsme. Mais malgré cette alternative de sentimens, le penchant pour l’idolâtrie est si fort, qu’avec les plus grandes précautions on n’est pas en état de prévenir les rechutes : quelques théïstes, les Juifs & les Mahométans sur-tout, l’ont parfaitement bien senti : c’est par cette raison qu’ils ont proscrit les statuaires & les peintres, & qu’ils sont allés jusqu’à défendre d’employer les couleurs & le marbre à la représentation des figures humaines, de peur que les foibles mortels n’en fissent dégénérer l’usage en culte idolâtre. Les hommes, d’un côté, n’ont pas l’esprit assez fort pour se contenter de