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De La Religion.

un Suprême ordonnateur ; son point de vue est renfermé dans d’étroites bornes ; il ne regarde ces grandes merveilles que d’un œil intéressé : il voit que son bonheur & son malheur dépendent de l’influence secrette, & du concours impénétrable des objets extérieurs : il ne détourne jamais son attention de ces causes inconnues qui, par des opérations aussi mystérieuses qu’elles sont efficaces, dispensent le mal & le bien, la peine & le plaisir : à chaque occasion, on en revient aux causes inconnues ; sous cet aspect général, sous cette image confuse, ce sont-là les objets perpétuels de nos espérances, de nos craintes & de nos desirs. Peu-à-peu, notre imagination se lasse de ces idées abstraites ; elle commence à les rendre plus déterminées, & à les revêtir d’une forme qui donne plus de prise : elle en fait des êtres sensibles & intelligens, des êtres semblables à nous, susceptibles d’amour & de haine, capables de se laisser fléchir par des présens, par des requêtes, par des prieres & par des sacrifices. C’est de-là que l’idolâ-