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Histoire naturelle.

jusqu’où elle peut aller, une comparaison qui plaît si fort à l’esprit de l’homme.

Il est vrai qu’on ne doit jamais s’attendre à voir des allégories parfaites, enfantées par l’ignorance & la superstition : il n’y a point de production de génie qui demande une touche plus délicate, & il n’y en a point où l’on ait moins réussi. La peur & la terreur sont les enfans de Mars ; Mais pourquoi Vénus est-elle leur mere[1] ? L’Harmonie est fille de Vénus mais est-il raisonnable qu’elle soit engendrée par Mars[2] ? Le Sommeil est le frere de la Mort ; mais à quoi bon le rendre amoureux d’une des trois Grâces[3] ? En voyant des fautes si grossieres & si palpables dans la mythologie des anciens, s’obstinera-t-on encore à y chercher les allusions les plus fines & les mieux soutenues[4] ?

  1. Hesiod. Theog. v. 935.
  2. Id. ibid. & Plutarch. in vitâ Pelop.
  3. Iliad. lib. XIV. v. 167.
  4. Il est clair que Lucrèce a été séduit par cette apparence d’allégorie qui regne dans les fictions du paganisme : il invoque d’abord, sous le nom de Vénus, ce pouvoir généra-