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De La Religion.

& d’où vint le chaos ? Le maître répliqua que ce n’étoit pas son affaire de résoudre cette question ; qu’il falloit s’adresser aux philosophes. C’est ce qui porta Épicure à abandonner la philologie & les autres études qui s’y rapportent, pour s’adonner tout entier à la science qui lui promettait de satisfaire la curiosité qu’il se sentoit pour des matieres aussi relevées[1].

Si les lettres & les interpretes des fables ont eu si peu de pénétration ; croirons-nous que le commun peuple ait poussé ses recherches jusqu’à se faire une religion raisonnée ? que dis-je ? Les philosophes même, raisonneurs par état sur ces sortes de sujets, ne se sont-ils pas accommodés, des doctrines les plus grossieres & les plus absurdes ? N’ont-ils pas enseigné que les dieux & les hommes tiroient leur origine commune de la nuit & du chaos, de l’eau, du feu, de l’air, ou de quelque autre élément qu’ils prenoient pour l’élément primitif ?

Ce n’est pas seulement par rapport à leur

  1. Sextus Empiricus, adversus Mathem. L. IX.