Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 3, 1788.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
De La Religion.

Même semblables aux nôtres ? J’aimerois autant croire que les palais ont été connus avant les chaumières, & que la géométrie a précédé l’agriculture. L’esprit ne s’élève que par degrés : il ne se forme l’idée du parfait qu’en faisant abstraction de ce qui ne l’est pas : discernant peu-à-peu ce qu’il y a de grand & de noble dans ses conceptions, de ce qu’il y a de petit & de chétif, il applique le premier, dans le degré le plus sublime, à la divinité. Si quelque chose pouvoit troubler cet ordre naturel de nos pensées, ce devroit être un argument, également clair & invincible, qui transportât immédiatement nos âmes dans les principes du théïsme, & qui leur fît, pour ainsi dire, franchir d’un saut le vaste intervalle qui est entre la nature humaine & la nature divine. Je ne nie point que par l’étude & l’examen cet argument ne puisse être tiré de la structure & de l’arrangement de l’univers ; mais, ce qui me paroît inconcevable, c’est qu’il ait été à la portée des hommes grossiers, lorsqu’ils se firent les premières idées d’une religion.

On ne s’amuse pas à rechercher les causes