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De La Religion.

& qui contracte une espece d’insensibilité pour tout.

Le bon, le grand, le sublime, le délicieux étant compris éminemment dans les principes purs du théïsme, l’analogie de la nature exige que le bas, le puérile, l’absurde, le terrible soient le partage des fictions & des chimeres religieuses.

Ce penchant que nous avons tous à croire l’existence d’un pouvoir intelligent & invisible, s’il n’est pas un instinct primitif, est au moins un résultat de l’usage de notre esprit, inséparable de la nature humaine : on peut l’envisager comme une marque que le divin ouvrier a imprimée à son ouvrage. Quoi de plus glorieux pour les hommes que d’avoir été choisis, parmi toutes les créatures, pour porter l’empreinte & l’image du créateur ! Mais, juste ciel ! Combien cette image est-elle défigurée dans les religions populaires ! Que la divinité devient méconnoissable dans les portraits que nous en traçons ! que de caprices, d’absurdités, & de défauts nous mettons en elle ! que nous la dégradons !