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De La Religion.

veur divine : supposons qu’il y ait des prêtres établis pour répéter, tous les jours, cette maxime dans leurs sermons, & pour l’inculquer aux esprits avec l’éloquence la plus persuasive : tel est l’attachement des hommes pour leurs vieux préjugés qu’au défaut de quelque autre superstition ils feroient consister l’essence de la religion à être réguliers à ces exercices, plutôt que de la placer dans la vertu & dans la morale. Nous ne voyons pas que le sublime prologue des loix de Zaleuque[1] ait inspiré aux Locriens, sur la maniere de se rendre la divinité favorable, des idées plus saines que n’en avoient les autres Grecs.

Notre observation est donc universellement vraie ; mais il n’en est pas pour cela moins difficile de rendre raison du fait. Il ne suffit pas de dire que le peuple est par-tout accoutumé à dégrader ses dieux, à les former sur son modèle, à en faire une espece de créatures humaines, seulement un peu plus éclairées & plus puissantes que nous : cela ne

  1. On le trouve dans Diodore de Sicile, lib. XII.