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Histoire naturelle.

Cependant on auroit tort de conclure de ces propos licencieux, que l’incrédulité & le scepticisme ayent été répandus parmi le peuple ; cela est manifestement faux. Il est vrai que certains articles de la religion établie, étoient assez indifférens à ceux qui la professoient ; mais d’autres leur tenoient plus à coeur : les Pyrrhoniens faisoient tous leurs efforts pour montrer que les uns n’étoient pas mieux fondés que les autres : Cotta se servit de cet artifice dans ses Dialogues sur la Nature des Dieux : pour réfuter le systême de la mythologie par degrés, il examine d’abord, avec son adversaire orthodoxe, les histoires les plus graves, & les plus

    [Ep. 14.] & Juvenal [Sat. 2.] disent également qu’il n’y a point de petit garçon, ni de vieille femme assez imbécille pour croire les descriptions que font les poëtes de l’état après la mort. D’où vient donc que Lucrèce exalte si fort son maître pour nous avoir délivrés des terreurs d’une autre vie ? Il se peut que le gros des hommes ait été alors dans les dispositions du Céphale de Platon : tant qu’il étoit jeune, & qu’il se portoit bien, il plaisantoit sur toutes ces histoires ; mais devenu vieux & infirme, il commença à appréhender qu’elles ne fussent vraies. De Rep. lib. I. Cela arrive encore assez fréquemment de nos jours.