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Histoire naturelle.

De tous les Stoïciens Grecs, il n’y eût que Panætius qui osa douter de la certitude de l’art des augures & des devins[1]. Marc-Antonin nous apprend lui-même qu’il a souvent reçu en songe des avis de la part des dieux[2]. Si Épictete nous défend de faire attention au langage des corneilles & des corbeaux ; ce n’est pas qu’il croie ce langage faux ; c’est qu’il le croit sans conséquence ; ces oiseaux ne peuvent nous prédire autre chose si ce n’est : tu te rompras le cou, tu feras la perte de tes biens, événemens qui, selon Épictete, ne nous regardent pas, & ne doivent en aucune façon nous intéresser[3]. Le stoïcisme est un mélange de superstition & d’enthousiasme philosophique ; l’esprit de cette secte, entiérement tourné vers la morale, déraisonne en fait de religion[4].

  1. Cic. de Divin, lib. I, cap. 3.
  2. Lib. I, §. 17.
  3. Enchiridion, §. 17.
  4. Les Stoïciens n’étoient pas tout-à-fait orthodoxes ; cependant on voit, par les exemples que nous venons de rapporter, qu’ils croyoient bien des choses ; le peuple, sans doute, croyoit tout ce qu’on vouloit lui faire croire.