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Les quatre.

d’un oeil aussi indifférent que je le regarde moi-même, vous ne le jugerez digne, ni de risée, ni de colere.

S’il y eût jamais un principe passablement certain en philosophie, je crois que c’est celui-ci : il n’y a rien qui soit, en lui-même, beau ou laid, digne d’amour ou de haine, d’estime ou de mépris, ces différentes qualifications dépendent uniquement des sentimens & des affections de chaque homme, en particulier. Comme ce qui, pour un animal, est une nourriture savoureuse, est un objet de dégoût pour l’autre ; de même ce qui m’affecte agréablement, peut causer à un autre des peines & des tourmens. On convient généralement que cela est vrai par rapport à tous les sens corporels. Mais, en examinant la chose de plus près, on trouvera qu’il en est de même dans tous les cas où l’ame, concourant avec le corps, mêle, pour ainsi dire, ses sentimens intérieurs avec les sensations externes.

Prions cet amant passionné de nous faire le portrait de sa maîtresse. Il manque d’expressions pour nous décrire tous ses charmes :