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Les quatre.

présens à notre esprit, lorsque nous réfléchissons sur l’excellence de cet art, qui d’une matiere informe a su tirer des expressions si naturelles & de si belles proportions. Quand tu m’invites à contempler, dans ta personne, l’harmonie des penchans, l’élévation des sentimens, & tous les charmes de ton esprit ; ne reconnois tu pas toi-même que le beau intellectuel est supérieur à tous les autres genres de beau ? Mais pourquoi t’arrêtes-tu ? Ne vois tu rien au-delà qui puisse mériter ton estime ? Pendant que tu prodigues tes applaudissemens à l’ordre & à la beauté, tu ignores où se trouve l’ordre le plus parfait, la beauté la plus consommée. Compare l’art avec la nature qu’il imite : plus ses ouvrages approchent du naturel, plus ils sont estimés ; mais ces deux choses demeureront toujours séparées par un intervalle immense. L’art ne peut copier que la surface de la nature : les ressorts, & les principes internes lui échappent : il ne sauroit les imiter ; ils surpassent ses forces, aussi-bien que sa compréhension. L’art se borne à l’imitation des petits ouvrages de