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Essais.

peut nous faire prévoir ni prédire aucun événement, nous faire espérer aucune récompense, ni craindre aucune punition, outre ce que nous connoissons déjà par voie de l’expérience & de l’observation. Ainsi, mon apologie pour Épicure demeure solide & satisfaisante : & les intérêts politiques de la société ne dépendent en rien des disputes philosophiques sur les sciences abstraites & sur la religion.

Il y a encore, répartis-je, une circonstance à considérer, que vous avez omise. Quand je vous accorderois vos prémisses, je nierois toujours votre conclusion. Vous concluez que les doctrines religieuses, & les argumens qu’on en dérive, ne peuvent avoir d’influence sur notre conduite & vous vous fondez sur ce qu’ils ne doivent point en avoir. Vous ne considérez pas que les hommes raisonnent autrement que vous, que la croyance d’un Dieu leur fournit plusieurs conséquences : & qu’ils supposent que ce Dieu infligera au crime des peines, & accordera à la vertu des récompenses, qui ne sont point comprises dans le cours ordinaire de