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Philosophiques.

jamais avoir la moindre raison de supposer ces qualités. La grande source de nos erreurs sur ce sujet, & de la licence démesurée des conjectures auxquelles nous nous livrons, c’est que nous mettant tacitement à la place du souverain Être, nous jugeons qu’il doit toujours tenir la même conduite, que dans sa situation nous aurions choisie comme la meilleure & la plus raisonnable[1]. Mais, outre que

    donc on ne sauroit trouver la moindre trace dans les effets, d’où cependant toute la connoissance que nous avons des causes tire son origine. Dès que la cause inférée est proportionnée, comme elle doit l’être, à l’effet connu, il est impossible qu’elle possede des qualités dont on puisse conclure de nouveaux ou de différens effets. Note de l’auteur.

  1. C’est l’antropomorphisme subtil ; & si M. Hume se bornoit à l’attaquer, il rendroit service à la philosophie & à la théologie, qui ont été fort gâtées par cette façon de penser, d’autant plus dangereuse qu’elle est naturelle à l’homme, & qu’il ne peut s’en défaire qu’à l’aide d’un degré fort rare de raison épurée. Mais, notre philosophe, au lieu de remédier à cet inconvénient, s’expose à un autre beaucoup plus grand, se jette dans une extrémité qui interdit à l’homme l’usage le plus légitime de la faculté de raisonner. Il y a de l’ordre & des beautés incontestables dans cette portion infi-