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Philosophiques.

siere ; puisque très-assurément nous ne comprenons pas davantage les opérations divines que celles des corps. Y a-t-il plus de difficulté à concevoir le mouvement comme résultant d’un choc que comme procédant d’une volition ? Tout ce que nous savons à ces deux égards, c’est que nous ne savons rien[1].

  1. Je n’ai pas besoin d’entrer dans un long examen de cette force d’inertie qu’on attribue à la matière, & donc il est tant parlé dans la philosophie moderne. Nous savons par expérience que les corps, soit en mouvement, soit en repos, conservent leur état actuel, jusqu’à ce qu’une nouvelle cause vienne les en dépouiller ; & que le corps choquant perd toujours autant de son mouvement qu’il en communique au corps choque. Ce ne sont-là que des faits, auxquels on donne le nom de force d’inertie, sans prétendre acquérir par-là l’idée d’un pouvoir qu’on nommeroit inerte : tout comme en parlant de la gravité, on n’entend que certains effets, sans comprendre la nature de pouvoir actif qui les produit. Ce ne fût jamais l’intention de M. Newton de priver la matière de toute énergie, quoique quelques-uns de ses disciples se soient servi de son autorité pour accréditer cette théorie. Tout au contraire, ce grand philosophe, pour expliquer son attraction universelle, recourut à une matière éthérée active : & il eût la circonspection & la modestie d’avouer que ce n’étoit-là qu’une hypothese, sur laquelle même il n’étoit pas bon d’insister avant que de l’avoir con-