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Essais.

séquent elle seroit en état de croire tout ce qu’il lui plaîroit ; ce qui est démenti par l’expérience journalière. Il ne tient qu’à nous de joindre en idée une tête humaine au tronc d’un cheval ; mais il ne tient pas à nous de croire qu’un pareil animal ait jamais existé dans la nature.

Ce qui distingue la fiction de ce qui est croyable, doit donc être quelque sentiment inséparable de l’une & incommunicable à l’autre ; d’où il suit que ce sentiment ne dépend point de la volonté, & ne se produit point par notre commandement. Excité par la nature, comme le sont tous les autres, il résulte de la situation particulière où l’esprit se trouve dans de certaines conjonctures. Un objet ne s’est pas plutôt emparé des sens ou de la mémoire, que l’habitude exerce son empire sur l’imagination, & la force à concevoir un autre objet que l’usage a lié au précédent : cette représentation est suivie de sentiment qui la rend si différente des illusions de la fantaisie ; & c’est précisément en quoi consiste la nature de la crédibilité. Comme nous ne croyons aucun fait avec