Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/116

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
108
Essais.

l’Univers. N’y eut-il, ni cercle, ni triangle dans la nature, les théorèmes démontrés par Euclide n’en conserveroient pas moins leur évidence & leur éternelle vérité.

Ce n’est pas ainsi que s’établit la certitude des choses de fait, qui composent la seconde classe des objets sur lesquels la raison s’exerce : quelque grande que puisse être cette certitude, elle est d’une nature différente. Le contraire de chaque fait demeure toujours possible, & ne pouvant jamais impliquer contradiction, l’esprit le conçoit aussi distinctement & aussi facilement que s’il étoit vrai & conforme à la réalité. Le soleil se lèvera, & le soleil ne se lèvera pas, sont deux propositions également intelligibles, & aussi peu contradictoires l’une que l’autre. On entreprendroit en vain de démontrer la fausseté de la derniere : si elle étoit démonstrativement fausse, elle impliqueroit contradiction & l’esprit ne pourroit jamais se la représenter d’une maniere distincte.

S’il y a donc une évidence qui nous certifie les existences réelles, & sur laquelle reposent ces choses de fait qui ne sont, ni pré-