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Ce jour-là, donc, il allait finir un sermon sur les châtiments qui attendent dès cette vie les malheureux ivrognes parce qu’ils ne cessent d’offenser Dieu… lorsque les fidèles le voient qui hésite… se trouble… se tait… Tous les yeux sont rivés sur la chaire… Ce ne fut pas long. Le pasteur sortant de son trouble, prononce d’une voix grave et recueillie ces paroles :

« Mes frères, je me sens pris subitement d’un mystérieux pressentiment… il me semble qu’un grand malheur plane sur la paroisse — Si vous le voulez, après la messe nous ferons ensemble le chemin de la croix, afin que Dieu éloigne ce malheur de nos têtes. »

L’assistance entendit ces paroles avec émotion et dans un profond silence. Après la messe tout le monde resta dans l’église — tout le monde, sauf deux individus : un hôtelier et l’un des plus forts ivrognes de la paroisse. Leur sortie scandalisa fort et fit trembler les fidèles…

Le chemin de la croix est terminé, l’église évacuée… la foule stationne sur la place et commente les paroles du curé… soudain arrive une nouvelle qui se répand comme une traînée de poudre : l’ivrogne sorti de l’église avant le chemin de la croix a été frappé de mort subite… Terreur et stupéfaction… les hommes