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se dégage… c’est serré, solide, à toute épreuve… et puis, les jambes et les bras sont dans l’étui, sa couverture est piquée au ras du cou, aucun risque à courir…

Alors, patiemment, savoureusement, elle attendit le réveil : tel un chat couve des yeux l’illusoire liberté de la souris dont il se joue. Elle avait dans les yeux, de la férocité… allons, de la charité, la mère Michaud.

Quand l’ivrogne eut fini de cuver son whisky, il s’éveilla, ouvrit un œil, les deux yeux, voulut se les frotter…

Nenni ! les mains étaient en prison, sous clef, sous drap, si vous préférez.

Il voulut s’étirer… Bernique ! en prison aussi les jambes…

À cet instant précis la mère Michaud entra en scène… avec un bâton…

Elle ne parla pas, mais le bâton parla très fort. Oh ! l’éloquence brutale des faits ! Il parla aux épaules, à l’échine, aux bras, aux jambes, à tout le corps du prisonnier, qui hurlait de rage et de honte autant que de douleur…

Que voulez-vous qu’il fît ?

On ne fait pas toujours ce que l’on veut en ce bas monde. Oh ! s’il l’avait pu, le père Michaud aurait de grand cœur interverti les rôles, je vous en passe un papier…

Mais souvent il faut se contenter de faire ce que