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maisons blanches qui compose à présent Heidelberg, se dresse superbement sur la ville, et fait étinceler au soleil la triomphante inscription où je lis tous les matins en passant que Jéhovah a été l’ouvrier et que Jéhovah a été le sauveur.

Il est vrai, car il faut tout dire, et la dévotion de la renaissance s’assaisonnait de fantaisies païennes, il est vrai que l’effet de ce grave psaume est un peu modifié par cette ligne profane que l’architecte a gravée au-dessus : Praestat invicta Venus, laquelle doit elle-même se sentir un peu gênée par cette troisième légende dont se couronne le fronton : Soli. Deo. Gloria.

    Néanmoins, ayant esté renforcés par un nombre de païsans armés, ils se mirent en devoir de revenir à la charge ; mais les grenadiers les poussèrent si vivement, qu’ils les obligèrent à prendre, derechef la fuite après leur avoir tué plus de cent cinquante hommes et fait plusieurs prisonniers. Les François n’ont eu dans cette affaire que trois hommes blessés, qui sont un grenadier du régime de la Reyne, un soldat de Picardie et un cavalier du régiment de Mélac. »

    Gazette du 1er juin
    « 22 au matin. Les ennemis, se voyant pressés et enveloppés par les batteries, voulurent abandonner le reste du fauxbourg en plein jour. On les. poussa jusqu’à la porte de la ville, qu’ils fermèrent ; les grenadiers de Picardie renfoncèrent à coups de hache, et, nonobstant leur grand feu, les poussèrent jusqu’à la porte du chasteau, que les assiégés fermèrent, et laissèrent dehors plus de cinq cents des leurs qui furent tués ou pris.
    «… Les troupes entrèrent de toutes parts dans la ville, qu’ils pillèrent, sans que les officiers généraux pussent Tempescher. Le chasteau demanda à capituler. Lé maréchal duc de Lorgès ne voulut pas accorder de condition. Ils se rendirent à discrétion, et sortirent le 23, au nombre de dix-huit cents hommes. Trois cents soldats prisonniers qui àvoient esté mis dans la grande église, mirent le feu aux deux clochers, qui se communiqua à la ville ; et quoi qu’on pût faire pour l’éteindre, en brûla la grande partie. On a trouvé quarante milliers de poudre, quantité de grenades, de bombes, douze pièces de canons en fonte et dix de fer. On s’est aussi rendu maître du pont de bateaux qu’ont fait les ennemis. »
    « Paris, 30 may 1693. Le roy partit de Compiègne le 22 du mois pour aller coucher à Roye ; le 23 il coucha à Péronne, le 24 à Cambray, et le 25 au Quesnoy.
    « Le roy et la reyne de la Grande-Bretagne vinrent ici le 27 voir Leurs Altesses Royales, et ils entendirent le salut au monastère des Capucines. »

    Gazette du 6 juin
    «… La ville estoit prise, les soldats, les cavaliers et les dragons y entrèrent de toutes parts et commencèrent à la piller… Les soldats ne purent estre arrestés, quelque peine que se donnassent les officiers pour empescher les suites du désordre et l’embrasement de la ville, quoy qu’ayant esté prise d’assaut, elle eut pu n’estre pas épargnée. Le marquis de Chamilly avoit fait d’abord mettre les prisonniers et plusieurs bourgeois avec leurs femmes et leurs enfants dans là grande église, comme en un lieu de seureté. Mais ces prisonniers mirent le feu aux deux clochers, d’où il se communiqua aux maisons de la ville et des fauxbourgs : où il avoit esté encore mis par hazard en quelques endroits, et s’estoit répandu presque partout, quelque soin qu’on prist pour l’éteindre. Le sieur de Heidersdorf, qui commandoit dans le chasteau, envoya cependant demander à capituler. Un capucin alla plusieurs fois de part et d’autre, accompagné d’un lieutenant-colonel et d’un magistrat. La capitulation fut conclue. On a trouvé dix milliers de plomb en saumon, sept en balles, cinq mille grenades chargées, cent bombes, un grand nombre d’outils. Les troupes ont commencé depuis à démolir les fortifications du chasteau. »

    Même numéro
    « Du Quesnoy, le 2 juin 1693.
    « Le 28 du mois dernier, un courrier dépesché par le maréchal duc de Lorges apporta au roy la nouvelle de la prise de Heidelberg. Le 31, le roy fit ses dévotions et toucha les malades. Sa Majesté nomma l’abbé de La Luzerne à l’évesché de Cahors, et l’abbé dé Denonville à l’évesché de Comminges. Sa Majesté a donné un canonicat de la Sainte-Chapelle au sieur Boileau, doyen de l’église dé Sens, et un autre au sieur Basire. »
    « De Paris, le 6 may 1693.
    (Sic Erreur, le 6 juin.)
    « Le premier de ce mois, on chanta en l’église de Notre-Dame, par l’ordre du roy, le Te Deum en actions de grâces de la réduction de Heidelberg. Les Compagnies y assistèrent avec les cérémonies accoutumées : et le soir, il y eut des feux dans toutes les rues. »
    Outre le sac de la ville, cette prise de Heidelberg eut un lugubre résultat. En arrivant au camp des Impériaux à Heilbron, le général Heidersdorf, qui avait capitulé avec le maréchal de Lorges, fut traduit devant des juges militaires et condamné à mort. Il eut la tête tranchée. Un capitaine et un lieutenant furent enveloppés dans le procès qu’on lui fit, et partagèrent son sort.