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de 1125 à 1422, en trois cents ans, Spire a essuyé onze sièges. Aussi la vieille ville carlovingienne est-elle profondément frappée. Ses privilèges sont tombés, son sang et sa population ont coulé de toutes parts. Elle a eu la chambre impériale dont Wetzlar a hérité, les diètes dont le fantôme est maintenant à Francfort. Elle a eu trente mille habitants, elle n’en a plus que huit mille.

Qui se souvient aujourd’hui du saint évêque Rudiger ? Où coule le ruisseau Spira ? Où est le village Spira ? Qu’a-t-on fait de l’église haute de saint-Jean ? Dans quel état est cette chapelle d’Olivet que les anciens registres appellent l’incomparable ? Qu’est devenue l’admirable tour carrée à tourelles angulaires qui dominait la porte de la route du bac ? Quels vestiges reste-t-il de Saint-Vilduberg ? Où est la maison de la chambre impériale ? Où est l’hôtel des assesseurs-avocats, lesquels, dit une vieille charte, sont faisans et administrans justice au nom de la majesté impériale, des électeurs et autres princes de l’empire, au consistoire publiq de tout l’empire établi par Charles-Le-Quint ? De cette haute juridiction, à laquelle toutes les autres étaient dévolues et ressortissantes en dernier ressort, que reste-t-il ? Rien, pas même le gibet de pierre à quatre piliers dans la prairie qui borde le Rhin. Le soleil seul continue de traiter Spire avec autant de magnificence que si elle était encore la reine des villes impériales. Le blé proverbial de Spire est toujours aussi beau et aussi doré que du temps de Charles-Quint, et l’excellent vin rouge pied-d’oison est toujours digne d’être bu par des princes-évêques en bas écarlates et des électeurs à chapeau d’hermine.

La cathédrale, commencée par Conrad Ier, continuée par Conrad II et Henri III, terminée par Henri IV en 1097, est un des plus superbes édifices qu’ait faits le onzième siècle. Conrad Ier l’avait dédiée, disent les chartes, à la « benoîte vierge Marie ». Elle est aujourd’hui d’une majesté incomparable. Elle a résisté au temps, aux hommes, aux guerres, aux assauts, aux incendies, aux émeutes, aux révolutions, et même aux embellissements des princes-évêques de Spire et Bruchsal. Je l’ai visitée ; je ne vous la détaillerai pas pourtant. Ici, comme dans la maison Ibach, je ne peux