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nérale, chaude, froide, ferrugineuse, sulfureuse ; pour le touriste, c’est un pays de redoutes et de concerts ; pour le pèlerin, c’est la châsse des grandes reliques qu’on ne voit que tous les sept ans, robe de la Vierge, sang de l’enfant Jésus, nappe sur laquelle fut décapité saint Jean-Baptiste ; pour l’antiquaire-chroniqueur, c’est une abbaye de nobles filles à abbesse immédiate, héritière du couvent d’hommes bâti par saint Grégoire, fils de Nicéphore, empereur d’orient ; pour l’amateur de chasses, c’est l’ancienne vallée des Sangliers, Porcetum, dont on a fait Borcette ; pour le manufacturier, c’est une source d’eau lessiveuse propre au lavage des laines ; pour le marchand, c’est une fabrique de drap et de casimirs, d’aiguilles et d’épingles ; pour celui qui n’est ni marchand, ni manufacturier, ni chasseur, ni antiquaire, ni pèlerin, ni touriste, ni malade, c’est la ville de Charlemagne.

Charlemagne, en effet, est né à Aix-la-Chapelle, et il y est mort. Il est né dans le vieux palais demi-romain des rois francs, dont il ne reste que la tour de Granus, enclavée aujourd’hui dans l’hôtel de ville. Il y est enterré dans l’église qu’il avait fondée deux ans après la mort de sa femme Fastrada, en 796, que le pape Léon III bénit en 804, et pour la dédicace de laquelle, dit la tradition, deux évêques de Tongres, morts et ensevelis à Maëstricht, sortirent de leurs sépulcres afin de compléter dans cette cérémonie les trois cent soixante-cinq archevêques et évêques représentant les jours de l’année.

Cette historique et fabuleuse église, qui a donné son nom à la ville, a subi, depuis mille ans, bien des transformations.

À peine arrivé à Aix, je suis allé à la Chapelle.

Si l’on aborde l’église par la façade, voici comment elle se présente :

Un portail du temps de Louis XV en granit gris bleu avec des portes de bronze du huitième siècle, adossé à une muraille carlovingienne que surmonte un étage de pleins cintres romans. Au-dessus de ces archivoltes un bel étage gothique richement ciselé, où l’on reconnaît l’ogive sévère du quatorzième siècle ; et pour couronnement une ignoble maçonnerie en brique à toit d’ardoise