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feu est au logis, et qu’il faut décamper sur-le-champ. — Au diable ! dit l’anglais, vous me réveillez pour cela ! Laissez-moi tranquille. Je suis fatigué et je ne me lèverai pas. Sont-ils fous de s’imaginer que je vais me mettre à courir les champs en chemise à minuit ! Je prétends dormir mes neuf heures tout à mon aise. Éteignez le feu si bon vous semble, je ne vous en empêche pas. Quant à moi, je suis bien dans mon lit, j’y reste. Bonne nuit, mes amis, à demain. -— Cela dit, il se recoucha. Il n’y eut aucun moyen de lui faire entendre raison, et, comme le feu gagnait, les gens se sauvèrent, après avoir refermé la porte sur l’anglais rendormi et ronflant. L’incendie fut terrible, on l’éteignit à grand’peine. Le lendemain matin, les hommes qui déblayaient les décombres arrivèrent à la chambre de l’anglais, ouvrirent la porte et trouvèrent le voyageur à demi éveillé, se frottant les yeux dans son lit, qui leur cria en bâillant dès qu’il les aperçut : — Pourriez-vous me dire s’il y a un tire-bottes dans cette maison ? — Il se leva, déjeuna très fort et repartit admirablement reposé et frais, au grand déplaisir des garçons du pays, lesquels comptaient bien faire avec la momie de l’anglais ce qu’on appelle dans la vallée du Rhin un bourgmestre sec, c’est-à-dire un mort parfaitement fumé et conservé qu’on montre pour quelques liards aux étrangers.