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que les démagogues pour dire ces choses-là.

La naïveté de l’histoire glorifiant le fait, quel qu’il soit, et si impie qu’il soit, n’éclate nulle part mieux que dans Cantemir et Karamsin, l’un l’historien turc, l’autre l’historien russe. Le fait ottoman et le fait moscovite offrent, lorsqu’on les confronte et qu’on les compare, l’identité tartare. Moscou n’est pas moins sinistrement asiatique que Stamboul. Yvan est sur l’une comme Mustapha sur l’autre. La nuance est imperceptible entre ce christianisme et ce mahométisme. Le pope est frère de l’uléma, le boyard du pacha, le knout du cordon, et le mougik du muet. Il y a pour les passants des rues peu de différence entre Sélim qui les perce de flèches et Basile qui lâche sur eux des ours. Cantemir, homme du Midi, ancien hospodar moldave, longtemps sujet turc, sent, quoique passé aux russes, qu’il ne déplaît point au czar Pierre en déifiant le despotisme, et il prosterne ses métaphores devant les sultans ; ce plat ventre est oriental, et quelque peu occidental aussi. Les sultans sont divins ; leur cimeterre est sacré, leur poignard est sublime, leurs exterminations sont magnanimes, leurs parricides sont bons. Ils se nomment cléments comme les furies se nomment euménides. Le sang qu’ils versent fume dans Cantemir avec une odeur d’encens, et le