Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/366

Cette page n’a pas encore été corrigée

Nous l’avons dit déjà, et nous y insistons, la nature et l’humanité sont en eux plus qu’en qui que ce soit. Ce sont des hommes surhumains, mais des hommes. Homo sum. Cette parole d’un poëte résume toute la poésie. Saint Paul se frappe la poitrine et dit : Peccamus. Job vous déclare qui il est : "Je suis le fils de la femme." Ils sont des hommes. Ce qui vous trouble, c’est qu’ils sont des hommes plus que vous ; ils sont trop des hommes, pour ainsi dire. Là où vous n’avez que la parcelle, ils ont le tout ; ils portent dans leur vaste cœur l’humanité entière, et ils sont vous plus que vous-même ; vous vous reconnaissez trop dans leur œuvre ; de là votre cri. A cette nature totale, à cette humanité complète, à cette argile, qui est toute votre chair et qui en même temps est toute la terre, ils ajoutent, et ceci achève votre terreur, la réverbération prodigieuse de l’inconnu. Ils ont des échappées de révélation, et subitement, et sans crier gare, à l’instant où l’on s’y attend le moins, ils crèvent la nuée, font au zénith une trouée d’où tombe un rayon, et ils éclairent le terrestre avec le céleste. Il est tout simple qu’on recherche médiocrement leur familiarité et qu’on n’ait point le goût de voisiner avec eux.

Quiconque n’a pas une vigoureuse éducation d’âme les évite volontiers. Aux livres colosses il