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chant au bouclier d’Achille, quelle intempérance ! Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire. Ces poëtes agitent, remuent, troublent, dérangent, bouleversent, font tout frissonner, cassent quelquefois des choses çà et là, peuvent faire des malheurs, c’est terrible. Ainsi parlent les athénées, les sorbonnes, les chaires assermentées, les sociétés dites savantes, Saumaise, successeur de Scaliger à l’université de Leyde, et la bourgeoisie derrière eux, tout ce qui représente en littérature et en art le grand parti de l’ordre. Quoi de plus logique ! la toux querelle l’ouragan.

Aux pauvres d’esprit s’ajoutent ceux qui ont trop d’esprit. Les sceptiques prêtent main-forte aux jocrisses. Les génies, à peu d’exceptions près, sont fiers et sévères ; ils ont cela dans la moelle des os. Ils ont dans leur compagnie Juvénal, Agrippa d’Aubigné et Milton ; ils sont volontiers revêches, méprisent le panem et circenses, s’apprivoisent peu et grondent. On les raille agréablement. C’est bien fait.

Ah ! poëte ! ah ! Milton ! ah ! Juvénal ! ah ! vous entretenez la résistance, ah ! vous perpétuez le désintéressement, ah ! vous rapprochez ces deux tisons, la foi et la volonté, pour en faire jaillir la flamme ! ah ! il y a de la vestale en vous, vieux mécontent ! ah ! vous avez un autel, la patrie ! ah ! vous avez un trépied, l’idéal ! ah !