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fin des indécis. Tirez-vous donc de vous-même ! Quel nœud gordien que notre rêverie ! l’esclavage du dedans, c’est là l’esclavage. Escaladez-moi cette enceinte : songer ! sortez, si vous pouvez, de cette prison : aimer ! l’unique cachot est celui qui mure la conscience. Prométhée, pour être libre, n’a qu’un carcan de bronze à briser et qu’un dieu à vaincre ; il faut que Hamlet se brise lui-même et se vainque lui-même. Prométhée peut se dresser debout, quitte à soulever une montagne ; pour que Hamlet se redresse, il faut qu’il soulève sa pensée. Que Prométhée s’arrache de la poitrine le vautour, tout est dit ; il faut que Hamlet s’arrache du flanc Hamlet. Prométhée et Hamlet, ce sont deux foies à nu ; de l’un coule le sang, de l’autre le doute.

On compare habituellement Eschyle et Shakespeare par Oreste et par Hamlet, ces deux tragédies étant le même drame. Jamais sujet ne fut plus identique en effet. Les doctes signalent là une analogie ; les impuissants, qui sont aussi les ignorants, les envieux, qui sont aussi les imbéciles, ont la petite joie de croire constater un plagiat. C’est du reste un champ possible pour l’érudition comparée et la critique sérieuse. Hamlet marche derrière Oreste, parricide par amour filial. Cette comparaison facile, plutôt de surface que de fond, nous frappe moins que la