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poëtes le dépassent dans cette recherche psychique. Plusieurs des particularités les plus étranges de l’âme humaine sont indiquées par lui. Il fait savamment sentir la simplicité du fait métaphysique sous la complication du fait dramatique. Ce qu’on ne s’avoue pas, la chose obscure qu’on commence par craindre et qu’on finit par désirer, voilà le point de jonction et le surprenant lieu de rencontre du cœur des vierges et du cœur des meurtriers, de l’âme de Juliette et de l’âme de Macbeth ; l’innocente a peur et appétit de l’amour comme le scélérat de l’ambition ; périlleux baisers donnés à la dérobée au fantôme, ici radieux, là farouche.

A toutes ces profusions, analyse, synthèse, création en chair et en os, rêverie, fantaisie, science, métaphysique, ajoutez l’histoire, ici l’histoire des historiens, là l’histoire du conte ; des spécimens de tout : du traître, depuis Macbeth, l’assassin de l’hôte, jusqu’à Coriolan, l’assassin de la patrie ; du despote, depuis le tyran cerveau, César, jusqu’au tyran ventre, Henri VIII ; du carnassier, depuis le lion jusqu’à l’usurier. On peut dire à Shylock : Bien mordu, juif ! Et, au fond de ce drame prodigieux, sur la bruyère déserte, au crépuscule, pour promettre aux meurtriers des couronnes, se dressent trois silhouettes noires, où Hésiode peut-être, à travers