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Tel prophète contient un scoliaste ; tel mage est un philologue. L’inspiration sait son métier. Tout poëte est un critique ; témoin cet excellent feuilleton de théâtre que Shakespeare met dans la bouche d’Hamlet. Tel esprit visionnaire est —en même temps précis ; comme Dante qui écrit une rhétorique et une grammaire. Tel esprit exact est en même temps visionnaire ; comme Newton qui commente l’Apocalypse ; comme Leibnitz qui démontre, nova inventa logica, la sainte Trinité. Dante connaît la distinction des trois sortes de mots, parola plana, parola sdrucciola, parole tronca ; il sait que la piana donne un trochée, la sdrucciola un dactyle et la tronca un ïambe. Newton est parfaitement sûr que le pape est l’antechrist. Dante combine et calcule ; Newton rêve.

Nulle loi saisissable dans cette obscurité. Nul système possible. Les adhérences et les cohésions croisent pêle-mêle leurs courants. Par moments on imagine surprendre le phénomène de la transmission de l’idée, et il semble qu’on voit distinctement une main prendre le flambeau à celui qui s’en va pour le donner à celui qui arrive. 1642, par exemple, est une année étrange. Galilée y meurt, Newton y naît. C’est bien. Voilà un fil, essayez de le nouer ; il se casse tout de suite. Voici une disparition : le