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donc, maîtres, et buvez, et finissez. Vivre est une chanson dont mourir est le refrain. D’autres creusent sous le genre humain dépravé des cachots redoutables ; en fait de souterrain, ce grand Rabelais se contente de la cave. Cet univers que Dante mettait dans l’enfer, Rabelais le fait tenir dans une futaille. Son livre n’est pas autre chose. Les sept cercles d’Alighieri bondent et enserrent cette tonne prodigieuse. Regardez le dedans de la futaille monstre, vous les y revoyez. Dans Rabelais ils s’intitulent : Paresse, Orgueil, Envie, Avarice, Colère, Luxure, Gourmandise ; et c’est ainsi que tout à coup vous vous retrouvez avec le rieur redoutable, où ? dans l’église. Les sept péchés, c’est le prône de ce curé. Rabelais est prêtre ; correction bien ordonnée commence par soi-même ; c’est donc sur le clergé qu’il frappe d’abord. Ce que c’est qu’être de la maison ! La papauté meurt d’indigestion, Rabelais lui fait une farce. Farce de Titan. La joie pantagruélique n’est pas moins grandiose que la gaieté jupitérienne. Mâchoire contre mâchoire ; la mâchoire monarchique et sacerdotale mange ; la mâchoire rabelaisienne rit. Quiconque a lu Rabelais a devant les yeux à jamais cette confrontation sévère : le masque de la Théocratie regardé fixement par le masque de la Comédie.