Page:Hugo - Ruy Blas, édition 1839.djvu/89

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Qui que tu sois, ami dont l’ombre m’accompagne,
Puisque mon cœur subit une inflexible loi,
Sois aimé par ta mère et sois béni par moi !

Vivement et portant la main à son cœur.

— Oh ! sa lettre me brûle ! —

Retombant dans sa rêverie.

Oh ! sa lettre me brûle ! —Et l’autre ! l’implacable
Don Salluste ! le sort me protège et m’accable.
En même temps qu’un ange, un spectre affreux me suit ;
Et, sans les voir, je sens s’agiter dans ma nuit,
Pour m’amener peut-être à quelque instant suprême,
Un homme qui me hait près d’un homme qui m’aime.
L’un me sauvera-t-il de l’autre ? Je ne sais.
Hélas ! mon destin flotte à deux vents opposés.
Que c’est faible une reine et que c’est peu de chose !
Prions.

Elle s’agenouille devant la madone.

Prions.— Secourez-moi, madame ! car je n’ose
Élever mon regard jusqu’à vous !

Elle s’interrompt.

Élever mon regard jusqu’à vous !— Ô mon dieu !
La dentelle, la fleur, la lettre, c’est du feu !

Elle met la main dans sa poitrine et en arrache une lettre froissée, un bouquet desséché de petites fleurs bleues et un morceau de dentelle taché de sang qu’elle jette sur la table ; puis elle retombe à genoux.

Vierge ! astre de la mer ! Vierge ! espoir du martyre !
Aidez-moi ! —