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Ruy Blas.

Espère !Espérer ! mais tu ne sais rien encore.
Vivre sous cet habit qui souille et déshonore,
Avoir perdu la joie et l’orgueil, ce n’est rien.
Être esclave, être vil ; qu’importe ? — Écoute bien :
Frère ! je ne sens pas cette livrée infâme,
Car j’ai dans ma poitrine une hydre aux dents de flamme,
Qui me serre le cœur dans ses replis ardents.
Le dehors te fait peur ? si tu voyais dedans !

Don César.

Que veux-tu dire ?

Ruy Blas.

Que veux-tu dire ?Invente, imagine, suppose.
Fouille dans ton esprit. Cherches-y quelque chose
D’étrange, d’insensé, d’horrible et d’inouï.
Une fatalité dont on soit ébloui !
Oui, compose un poison affreux, creuse un abîme
Plus sourd que la folie et plus noir que le crime,
Tu n’approcheras pas encore de mon secret.
— Tu ne devines pas ? — Hé ! qui devinerait ? —
Zafari ! dans le gouffre où mon destin m’entraîne,
Plonge les yeux ! — Je suis amoureux de la reine !

Don César.

Ciel !

Ruy Blas.

Ciel !Sous un dais orné du globe impérial,