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Don Salluste, poursuivant.

Juste ciel !Seulement il a parlé trop tôt.

Il croise les bras et se redresse, avec une voix tonnante.

Eh bien oui ! maintenant disons tout. Il n’importe !
Ma vengeance est assez complète de la sorte.

À la reine.

Qu’en pensez-vous ? Madrid va rire, sur ma foi !
Ah ! vous m’avez cassé ! je vous détrône, moi.
Ah ! vous m’avez banni ! je vous chasse, et m’en vante !
Ah ! vous m’avez pour femme offert votre suivante !

Il éclate de rire.

Moi, je vous ai donné mon laquais pour amant.
Vous pourrez l’épouser aussi ! certainement.
Le roi s’en va ! — Son cœur sera votre richesse !

Il rit.

Et vous l’aurez fait duc afin d’être duchesse !

Grinçant des dents.

Ah ! Vous m’avez brisé, flétri, mis sous vos pieds,
Et vous dormiez en paix, folle que vous étiez !

Pendant qu’il a parlé, Ruy Blas est allé à la porte du fond et en a poussé le verrou, puis il s’est approché de lui sans qu’il s’en soit aperçu, par derrière, à pas lents. Au moment où don Salluste achève, fixant des yeux pleins de haine et de triomphe sur la reine anéantie, Ruy Blas saisit l’épée du marquis par la poignée et la tire vivement.
Ruy Blas, terrible, l’épée de don Salluste à la main.

Je crois que vous venez d’insulter votre reine !