Page:Hugo - Ruy Blas, édition 1839.djvu/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le maître va peut-être arriver en personne.
Je suis pris.

Entre un des noirs. Don César, en proie à la plus vive anxiété, se retourne du côté opposé comme ne sachant que devenir.
Le Laquais, au nègre.

Je suis pris.Remettez l’agrafe à monseigneur.

Le nègre s’approche gravement de don César, qui le regarde faire d’un air stupéfait ; puis il rattache l’agrafe du manteau, salue et sort, laissant don César pétrifié.
Don César, se levant de table.
À part.

Je suis chez Belzébuth, ma parole d’honneur !

Il vient sur le devant et s’y promène à grands pas.

Ma foi, laissons-nous faire, et prenons ce qui s’offre.
Donc je vais remuer les écus à plein coffre.
J’ai de l’argent ! que vais-je en faire ?

Se retournant vers le laquais attablé, qui continue à boire et qui commence à chanceler sur sa chaise.

J’ai de l’argent ! que vais-je en faire ? Attends, pardon !

Rêvant, à part.

Voyons, — si je payais mes créanciers ? — fi donc !
— Du moins, pour les calmer, âmes à s’aigrir promptes,
Si je les arrosais avec quelques à-comptes ?
— À quoi bon arroser ces vilaines fleurs-là ?
Où diable mon esprit va-t-il chercher cela ?
Rien n’est tel que l’argent pour vous corrompre un homme,
Et, fût-il descendant d’Annibal qui prit Rome,