Page:Hugo - Lucrèce Borgia, Dessau, 1833.djvu/86

Cette page n’a pas encore été corrigée

’un fils ne se trompe pas sur sa mère. Je la haïrais si elle pouvait vous ressembler. Mais non, non. Il y a quelque chose en moi qui me dit bien haut que ma mère n’est pas un de ces démons d’inceste, de luxure, et d’empoisonnement comme vous autres, les belles femmes d’à présent. Oh dieu ! J’en suis bien sûr, s’il y a sous le ciel une femme innocente, une femme vertueuse, une femme sainte, c’est ma mère ! Oh ! Elle est ainsi, et pas autrement ! Vous la connaissez, sans doute, Madame Lucrèce, et vous ne me démentirez point !

Dona Lucrezia. Non, cette femme-là, Gennaro, cette mère-là, je ne la connais pas !

Gennaro. Mais devant qui est-ce que je parle ainsi ? Qu’est-ce que cela vous fait à vous, Lucrèce Borgia, les joies ou les douleurs d’une mère ! Vous n’avez jamais eu d’enfans, à ce qu’on dit, et vous êtes bien heureuse. Car vos enfans, si vous en aviez, savez-vous bien qu’ils vous renieraient, madame ? Quel malheureux assez abandonné du ciel voudrait d’une pareille mère ? être le fils de Lucrèce Borgia ! Dire ma mère à Lucrèce Borgia ! Oh !…

Dona Lucrezia. Gennaro ! Vous êtes empoisonné ; le duc, qui vous croit mort, peut revenir à tout momen