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LE PETIT-FILS ET LE GRAND-PÈRE.

s’empêcher de confier à sa femme cet aparté : Je ne sais pourquoi je me figure toujours que j’ai déjà vu ce visage-là.

M. Fauchelevent, dans la chambre de Marius, restait comme à l’écart près de la porte. Il avait sous le bras un paquet assez semblable à un volume in-octavo, enveloppé dans du papier. Le papier de l’enveloppe était verdâtre et semblait moisi.

— Est-ce que monsieur a toujours comme cela des livres sous le bras ? demanda à voix basse à Nicolette mademoiselle Gillenormand qui n’aimait point les livres.

— Eh bien, répondit du même ton M. Gillenormand qui l’avait entendue, c’est un savant. Après ? Est-ce sa faute ? M. Boulard, que j’ai connu, ne marchait jamais sans un livre, lui non plus, et avait toujours comme cela un bouquin contre son cœur.

Et, saluant, il dit à haute voix :

— Monsieur Tranchelevent…

Le père Gillenormand ne le fit pas exprès, mais l’inattention aux noms propres était chez lui une manière aristocratique.

— Monsieur Tranchelevent, j’ai l’honneur de vous demander pour mon petit-fils, monsieur le baron Marius Pontmercy, la main de mademoiselle.

« Monsieur Tranchelevent » s’inclina.

— C’est dit, fit l’aïeul.

Et, se tournant vers Marius et Cosette, les deux bras étendus et bénissant, il cria :

— Permission de vous adorer.

Ils ne se le firent pas dire deux fois. Tant pis ! le gazouil-