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LES MISÉRABLES. — JEAN VALJEAN.

la rue Saint-Denis, et il était fâcheux qu’il n’y fût pas. Il y a sous la rue Saint-Denis un vieil égout en pierre qui date de Louis XIII et qui va droit à l’égout collecteur dit Grand Égout, avec un seul coude, à droite, à la hauteur de l’ancienne cour des Miracles, et un seul embranchement, l’égout Saint-Martin, dont les quatre bras se coupent en croix. Mais le boyau de la Petite-Truanderie dont l’entrée était près du cabaret de Corinthe n’a jamais communiqué avec le souterrain de la rue Saint-Denis ; il aboutit à l’égout Montmartre et c’est là que Valjean était engagé. Là, les occasions de se perdre abondaient. L’égout Montmartre est un des plus dédaléens du vieux réseau. Heureusement Jean Valjean avait laissé derrière lui l’égout des halles dont le plan géométral figure une foule de mâts de perroquet enchevêtrés ; mais il avait devant lui plus d’une rencontre embarrassante et plus d’un coin de rue — car ce sont des rues — s’offrant dans l’obscurité comme un point d’interrogation ; premièrement, à sa gauche, le vaste égout Plâtrière, espèce de casse-tête chinois, poussant et brouillant son chaos de T et de Z sous l’hôtel des Postes et sous la rotonde de la halle aux blés jusqu’à la Seine où il se termine en Y ; deuxièmement, à sa droite, le corridor courbe de la rue du Cadran avec ses trois dents qui sont autant d’impasses ; troisièmement, à sa gauche, l’embranchement du Mail, compliqué, presque à l’entrée, d’une espèce de fourche, et allant de zigzag en zigzag aboutir à la grande crypte exutoire du Louvre tronçonnée et ramifiée dans tous les sens ; enfin, à droite, le couloir cul-de-sac de la rue des Jeûneurs, sans compter de petits réduits çà et là, avant d’arriver à l’égout