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CORINTHE.

une huître et une révolution de travers ! Je redeviens lugubre. Oh ! l’affreux vieux monde ! On s’y évertue, on s’y destitue, on s’y prostitue, on s’y tue, on s’y habitue !

Et Grantaire, après cette quinte d’éloquence, eut une quinte de toux, méritée.

— À propos de révolution, dit Joly, il paraît que décidébent Barius est aboureux.

— Sait-on de qui ? demanda Laigle.

— Don.

— Non ?

— Don ! je te dis !

— Les amours de Marius ! s’écria Grantaire. Je vois ça d’ici. Marius est un brouillard, et il aura trouvé une vapeur. Marius est de la race poëte. Qui dit poëte dit fou. Tymbrœus Apollo. Marius et sa Marie, ou sa Maria, ou sa Mariette, ou sa Marion, cela doit faire de drôles d’amants. Je me rends compte de ce que cela est. Des extases où l’on oublie le baiser. Chastes sur la terre, mais s’accouplant dans l’infini. Ce sont des âmes qui ont des sens. Ils couchent ensemble dans les étoiles.

Grantaire entamait sa seconde bouteille, et peut-être sa seconde harangue quand un nouvel être émergea du trou carré de l’escalier. C’était un garçon de moins de dix ans, déguenillé, très petit, jaune, le visage en museau, l’œil vif, énormément chevelu, mouillé de pluie, l’air content.

L’enfant, choisissant sans hésiter parmi les trois, quoiqu’il n’en connût évidemment aucun, s’adressa à Laigle de Meaux.

— Est-ce vous qui êtes monsieur Bossuet ? demanda-t-il ?