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à ce que je te dis, jure-moi que tu ne diras pas l’adresse que tu sais à ton père !

— Mon père ? dit-elle. Ah oui, mon père ! Soyez donc tranquille. Il est au secret. D’ailleurs est-ce que je m’occupe de mon père !

— Mais tu ne me promets pas ! s’écria Marius.

— Mais lâchez-moi donc ! dit-elle en éclatant de rire, comme vous me secouez ! Si ! si ! je vous promets ça ! je vous jure ça ! qu’est-ce que cela me fait ? je ne dirai pas l’adresse à mon père. Là ! ça va-t-il ? c’est-il ça ?

— Ni à personne ? fit Marius.

— Ni à personne.

— À présent, reprit Marius, conduis-moi.

— Tout de suite ?

— Tout de suite.

— Venez. — Oh ! comme il est content ! dit-elle.

Après quelques pas, elle s’arrêta.

— Vous me suivez de trop près, monsieur Marius. Laissez-moi aller devant, et suivez-moi comme cela, sans faire semblant. Il ne faut pas qu’on voie un jeune homme bien, comme vous, avec une femme comme moi.

Aucune langue ne saurait dire tout ce qu’il y avait dans ce mot, femme, ainsi prononcé par cette enfant.

Elle fit une dizaine de pas, et s’arrêta encore ; Marius la rejoignit. Elle lui adressa la parole de côté et sans se tourner vers lui :

— À propos, vous savez que vous m’avez promis quelque chose ?

Marius fouilla dans sa poche. Il ne possédait au monde