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des quatre coins en avait reçu, dans le langage des pensionnaires, un nom particulier et expressif. Il y avait le coin des Araignées, le coin des Chenilles, le coin des Cloportes et le coin des Cricris. Le coin des Cricris était voisin de la cuisine et fort estimé. On y avait moins froid qu’ailleurs. Du réfectoire les noms avaient passé au pensionnat et servaient à y distinguer comme à l’ancien collège Mazarin quatre nations. Toute élève était de l’une de ces quatre nations selon le coin du réfectoire où elle s’asseyait aux heures des repas. Un jour, Mr l’archevêque, faisant la visite pastorale, vit entrer dans la classe où il passait une jolie petite fille toute vermeille avec d’admirables cheveux blonds, il demanda à une autre pensionnaire, charmante brune aux joues fraîches qui était près de lui :

— Qu’est-ce que c’est que celle-ci ?

— C’est une araignée, monseigneur.

— Bah ! et cette autre ?

— C’est un cricri.

— Et celle-là ?

— C’est une chenille.

— En vérité ! et vous-même ?

— Je suis un cloporte, monseigneur.

Chaque maison de ce genre a ses particularités. Au commencement de ce siècle, Écouen était un de ces lieux gracieux et sévères où grandit, dans une ombre presque auguste, l’enfance des jeunes filles. À Écouen, pour prendre rang dans la procession du saint sacrement, on distinguait entre les vierges et les fleuristes. Il y avait aussi « les dais » et « les encensoirs », les unes portant les cordons du dais, les