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— De la source qui est dans le bois.

— Et est-ce loin où tu vas ?

— À un bon quart d’heure d’ici.

L’homme resta un moment sans parler, puis il dit brusquement :

— Tu n’as donc pas de mère ?

— Je ne sais pas, répondit l’enfant.

Avant que l’homme eût eu le temps de reprendre la parole, elle ajouta :

— Je ne crois pas. Les autres en ont. Moi, je n’en ai pas.

Et après un silence, elle reprit :

— Je crois que je n’en ai jamais eu.

L’homme s’arrêta, il posa le seau à terre, se pencha et mit ses deux mains sur les deux épaules de l’enfant, faisant effort pour la regarder et voir son visage dans l’obscurité.

La figure maigre et chétive de Cosette se dessinait vaguement à la lueur livide du ciel.

— Comment t’appelles-tu ?

— Cosette.

L’homme eut comme une secousse électrique. Il la regarda encore, puis il ôta ses mains de dessus les épaules de Cosette, saisit le seau, et se remit à marcher.

Au bout d’un instant, il demanda :

— Petite, où demeures-tu ?

— À Montfermeil, si vous connaissez.

— C’est là que nous allons ?

— Oui, monsieur.

Il fit encore une pause, puis il recommença :