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Quand l’homme à la redingote jaune eut dépisté l’agent, il doubla le pas, non sans s’être retourné bien des fois pour s’assurer qu’il n’était pas suivi. À quatre heures un quart, c’est-à-dire à la nuit close, il passait devant le théâtre de la porte Saint-Martin où l’on donnait ce jour-là les deux Forçats. Cette affiche, éclairée par les réverbères du théâtre, le frappa, car, quoiqu’il marchât vite, il s’arrêta pour la lire. Un instant après, il était dans le cul-de-sac de la Planchette, et il entrait au Plat d’Étain, où était alors le bureau de la voiture de Lagny. Cette voiture partait à quatre heures et demie. Les chevaux étaient attelés, et les voyageurs, appelés par le cocher, escaladaient en toute hâte le haut escalier de fer du coucou.

L’homme demanda :

— Avez-vous une place ?

— Une seule, à côté de moi, sur le siège, dit le cocher.

— Je la prends.

— Montez.

Cependant, avant de partir, le cocher jeta un coup d’œil sur le costume médiocre du voyageur, sur la petitesse de son paquet, et se fit payer.

— Allez-vous jusqu’à Lagny ? demanda le cocher.

— Oui, dit l’homme.

Le voyageur paya jusqu’à Lagny.

On partit. Quand on eut passé la barrière, le cocher essaya de nouer la conversation, mais le voyageur ne répondait que par monosyllables. Le cocher prit le parti de siffler et de jurer après ses chevaux.

Le cocher s’enveloppa de son manteau. Il faisait froid.