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été dites, il n’entrevoyait distinctement qu’une chose, c’est qu’un guet-apens se préparait, un guet-apens obscur, mais terrible ; c’est qu’ils couraient tous les deux un grand danger, elle probablement, son père à coup sûr ; c’est qu’il fallait les sauver ; c’est qu’il fallait déjouer les combinaisons hideuses des Jondrette et rompre la toile de ces araignées.

Il observa un moment la Jondrette. Elle avait tiré d’un coin un vieux fourneau de tôle et elle fouillait dans des ferrailles.

Il descendit de la commode le plus doucement qu’il put et en ayant soin de ne faire aucun bruit.

Dans son effroi de ce qui s’apprêtait et dans l’horreur dont les Jondrette l’avaient pénétré, il sentait une sorte de joie à l’idée qu’il lui serait peut-être donné de rendre un tel service à celle qu’il aimait.

Mais comment faire ? Avertir les personnes menacées ? où les trouver ? Il ne savait pas leur adresse. Elles avaient reparu un instant à ses yeux, puis elles s’étaient replongées dans les immenses profondeurs de Paris. Attendre M. Leblanc à la porte le soir à six heures, au moment où il arriverait, et le prévenir du piége ? Mais Jondrette et ses gens le verraient guetter, le lieu était désert, ils seraient plus forts que lui, ils trouveraient moyen de le saisir ou de l’éloigner, et celui que Marius voulait sauver serait perdu. Une heure venait de sonner, le guet-apens devait s’accomplir à six heures. Marius avait cinq heures devant lui.

Il n’y avait qu’une chose à faire.

Il mit son habit passable, se noua un foulard au cou,