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mon enfant avec sa blessure, nous serons tous quatre chassés d’ici, et jetés dehors, dans la rue, sur le boulevard, sans abri, sous la pluie, sur la neige. Voilà, monsieur. Je dois quatre termes, une année ! c’est-à-dire une soixantaine de francs.

Jondrette mentait. Quatre termes n’eussent fait que quarante francs, et il n’en pouvait devoir quatre, puisqu’il n’y avait pas six mois que Marius en avait payé deux.

M. Leblanc tira cinq francs de sa poche et les jeta sur la table.

Jondrette eut le temps de grommeler à l’oreille de sa grande fille :

— Gredin ! que veut-il que je fasse avec ses cinq francs ? Cela ne me paye pas ma chaise et mon carreau ! Faites donc des frais !

Cependant, M. Leblanc avait quitté une grande redingote brune qu’il portait par-dessus sa redingote bleue et l’avait jetée sur le dos de la chaise.

— Monsieur Fabantou, dit-il, je n’ai plus que ces cinq francs sur moi, mais je vais reconduire ma fille à la maison et je reviendrai ce soir ; n’est-ce pas ce soir que vous devez payer ?…

Le visage de Jondrette s’éclaira d’une expression étrange. Il répondit vivement :

— Oui, mon respectable monsieur. À huit heures je dois être chez mon propriétaire.

— Je serai ici à six heures, et je vous apporterai les soixante francs.

— Mon bienfaiteur ! cria Jondrette éperdu.