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V


LE JUDAS DE LA PROVIDENCE


Marius depuis cinq ans avait vécu dans la pauvreté, dans le dénûment, dans la détresse même, mais il s’aperçut qu’il n’avait point connu la vraie misère. La vraie misère, il venait de la voir. C’était cette larve qui venait de passer sous ses yeux. C’est qu’en effet qui n’a vu que la misère de l’homme n’a rien vu, il faut voir la misère de la femme ; qui n’a vu que la misère de la femme n’a rien vu, il faut voir la misère de l’enfant.

Quand l’homme est arrivé aux dernières extrémités, il arrive en même temps aux dernières ressources. Malheur aux êtres sans défense qui l’entourent ! Le travail, le salaire, le pain, le feu, le courage, la bonne volonté, tout lui manque à la fois. La clarté du jour semble s’éteindre au dehors, la lumière morale s’éteint au dedans ; dans ces ombres, l’homme rencontre la faiblesse de la femme et de l’enfant, et les ploie violemment aux ignominies.

Alors toutes les horreurs sont possibles. Le désespoir