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On n'est pas sûr qu'il soit de l'avis qu'on désire.
Vous avez un conseil de jeunes hommes, sire,
Fort galants, fort jolis, fort blonds, convenez-en ;
Pourquoi m'y faire entrer, moi le vieux paysan
Que la rude fierté des vieilles mœurs pénètre ?
Et depuis quand a-t-on l'habitude de mettre
Une pièce de cuir aux pourpoints de velours ?
Pour marcher devant vous, rois, mes pas sont bien lourds.

Si vous ne savez pas de quel nom je me nomme,
Je m'appelle Elciis, et je suis gentilhomme
De la ville de Pise, âpre et sévère endroit.
Je n'ai point à Pavie étudié le droit,
Et je n'ai pas l'esprit d'un docteur de Sorbonne.
Donc, sire, si la guerre est en soi chose bonne,
Je n'en sais rien ; mais, bonne ou mauvaise, je dis
Qu'il faut la faire en gens sincères et hardis,
Et que l'honnêteté publique est en détresse,
Princes, de voir qu'on fait une guerre traîtresse,
Une guerre humble, habile aux besognes de nuit,
Achetant des félons et des lâches sans bruit,
Faisant moins résonner l'estoc que la cymbale,
Ayant des espions, des colporteurs de balle,
Des moines mendiants et des juifs pour appuis,
Et l'empoisonnement des sources et des puits.