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Là Caïn pleure, Achab frémit, Commode rêve,
Borgia rit ; les vers de terre armés du glaive,
            Les roseaux qui disaient : je veux !
Sont là ; les Pharaons et les Sardanapales
65S’y courbent ; le vent souffle ; au fond, des larves pâles
            Penchent leurs sinistres cheveux.

Là sont les trahisseurs mêlés aux parricides,
Tous les despotes fous redevenus lucides,
            L’homme-loup et l’homme-renard,
70Leur bagne par moment fait le bruit d’une claie ;
Le ciel leur apparaît comme une immense plaie
            Où chacun d’eux voit son poignard.

L’ombre est un miroir sombre où leurs forfaits se montrent,
Leur remords est debout dans tout ce qu’ils rencontrent ;
            75Partout, dans le morne chemin,
Chacun d’eux voit son crime, et le reste est chimère ;
Le même spectre fait dire à Néron : ma mère !
            Et crier : mon frère ! à Caïn.