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Boutons d'or que j'ai vus jadis aux Feuillantines,
Renaissez ! Fourmillez, liserons, églantines,
Pâquerettes, iris, muguets, lilas, jasmins !
Le petit enfant mai frappe dans ses deux mains.
Allons, dépêchez-vous de naître, il vous appelle.
Il veut parer la terre ainsi qu'une chapelle,
Et mettre une guirlande autour du genre humain.
Avril s'appelle Amour et juin s'appelle Hymen,
Le fruit suivra la fleur. Faisons des nids, fauvettes !
La jeune fille rêve et rit quand vous en faites.
Donnez l'exemple, oiseaux ! les vierges aux yeux doux
Vous regardent, ayant des ailes comme vous.
J'erre ; un vent tiède émeut les bois, je vois les scènes
Que font les pauvres fleurs aux papillons obscènes ;
Le lys vers le bourdon se penche, et, l'écoutant,
A l'air de s'écrier : Ah ! vous m'en direz tant !
L'ombre a le tremblement sonore d'une tente
Et cache les amours ; la nature est contente ;
Et la fécondité fermente ; et les appas,
Les soupirs, les baisers, ne s'inquiètent pas
Si quelque orage couve, et si cette gorgone,
La foudre, au loin, là-bas, à l'horizon bougonne.
Le vallon fleuri semble un encensoir fumant.
Quelqu'un a mis le feu partout, l'embrasement
Va de l'arbre au nuage et du ciel à la terre ;
La prairie a l'éclat glorieux d'un cratère,
Partout des fleurs de pourpre, et tout flambe et tout luit,
Et la création bouillonnant à grand bruit