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Portant sur son front l'aube ainsi qu'un diadème.
Pur, lumineux, serein, parfait, calme ; il voudrait
Être seul en dehors de l'effrayant secret.
Quoi ! tout ce qui naît, vit, s'allume, se consomme,
Brille et meurt, ce serait pour aboutir à l'homme !
L'homme serait le but du splendide univers !
Mais que dirait la cendre et que diraient les vers ?
Quoi ! la création aurait pour toute fête
Et pour tout horizon d'avoir l'homme à son faîte !
Dieu serait pour l'atome un piédestal d'orgueil !
Non ! l'homme souffre et rampe ; il est son propre écueil ;
Il tremble et tombe ; il sent peser sur lui sans cesse
Son âme en ignorance et sa chair en bassesse ;
Il est triste le soir et triste le matin ;
Il tâte en vain le cercle où tourne son destin ;
L'astre qu'il porte en lui suit une obscure ellipse ;
La matière le voile et le sommeil l'éclipse ;
Son berceau cache un gouffre ainsi que son cercueil ;
C'est que tout a son crêpe et que tout a son deuil !
Eh ! ne sommes-nous pas humiliés nous-même,
Nous les soleils, les feux du firmament suprême,
Quand l'ombre ouvre l'abîme où nous nous engouffrons :
Avec les sombres nuits, ces immenses affronts ! —</